Rachid YOUSRY, DG de LafargeHolcim Ci et Président de l'APCCI s'exprime sur la réglementation du prix du ciment

Le gouvernement ivoirien, dans le cadre de la lutte contre la cherté de la vie, vient de mettre fin aux différentes spéculations sur le prix du ciment à travers un arrêté interministériel en date du 26 décembre 2024. Plus d’un mois après son entrée en vigueur, le président de l’Association des producteurs de ciment de Côte d’Ivoire (Apcci), Rachid Yousry s’est confié à L’inter. Au cours d’une rencontre à ses bureaux, à Abidjan-Plateau, le 30 janvier 2025, il a présenté les avantages de l’arrêté du gouvernement. Selon lui, cette régulation a entrainé une baisse significative des prix :« Le ciment est passé d’un prix plafonné de 85 000 Fcfa la tonne (Cpj 42.5), à un prix de 78 000 Fcfa, ce qui représente 7 000 Fcfa de baisse. Le Cpj 32.5 est passé à 72 000 Fcfa contre 83 000 Fcfa, soit 11 000 Fcfa de différence. Les prix usine sont de 78 000 Fcfa pour le 42.5. Mais il y a aussi le coût du transport qui a été fixé à 30 Fcfa la tonne kilomètre », a informé le président l’Apcci qui précise que : « L’arrêté est appliqué à environ 70 %. Cependant, certains opérateurs au niveau de la chaine de distribution ne l’ont pas mis en oeuvre, selon les informations du marché. » L'objectif principal de cette mesure est d'éviter les fluctuations excessives et de garantir une meilleure transparence tout au long de la chaîne d'approvisionnement. « Il y a pas mal d’intermédiaires autour du ciment : les marges des différents acteurs ont été clairement définies : 2 000 Fcfa pour les grossistes, 5 000 Fcfa pour les détaillants, et des ristournes plafonnées à 2 000 Fcfa. Tout cela pour éviter le dumping (la vente de produits à des prix artificiellement bas, Ndlr) sur le marché et préserver un équilibre entre la protection du consommateur et la viabilité du secteur industriel. », a souligné le président de l’Apcci. 
 

L’apport des cimentiers

Au-delà des actions du gouvernement à travers l’arrêté, pour contribuer plus à la lutte contre la cherté de la vie, les cimentiers ont introduit le Cpj 32.5, un produit plus respectueux de l'environnement, grâce à une consommation réduite de clinker, composant essentiel du ciment. Ce choix s'inscrit dans une démarche de promotion de solutions durables mais aussi sur le fait que ce produit satisfait les besoins du consommateur. L'arrêté a également permis une évolution des tarifs des sacs et des tonnes de ciment. Ainsi, le sac de Cpj 42.5 est passé de 4 850 Fcfa à 4 500 Fcfa à Abidjan et dans un rayon de 100 km, tandis que le Cpj 32.5 est désormais commercialisé à 4 200 Fcfa contre 4 750 Fcfa auparavant. La tonne de Cpj 42.5 au détail a été révisée à 90 000 Fcfa contre 97 000 Fcfa, et celle du Cpj 32.5 à 84 000 Fcfa contre 95 000 Fcfa. Avec cet arrêté, la bataille entre les concurrents sera désormais orientée sur la qualité du produit, l’innovation et le service. Une chose qui ne peut être que dans l’intérêt du secteur de la construction en Côte d’Ivoire. 
 

Opérations de contrôle

Le président de l’Apcci a indiqué que l’organisation et le contrôle tout au long de la chaine de distribution du ciment va assurer la stabilité recherchée au niveau des prix. Pour y arriver, il a appelé à miser sur la sensibilisation et la communication sur le marché, que ça soit pour les distributeurs grossistes pour dire quels sont les prix sur les marchés et quels sont les risques qu’ils sont en train de courir s’ils n’appliquent pas ces prix, et faire la même chose pour les détaillants. A ce niveau, Rachid Yousry a informé que l’Apcci envisage des actions de communication et de sensibilisation des utilisateurs et les consommateurs de ciments sur le marché au niveau de chaque ville. « Pour garantir la bonne mise en oeuvre de ces dispositions, nous avons compris que des opérations de contrôle vont être menées par les inspecteurs et contrôleurs du ministère du Commerce, notamment au sein de la Direction du commerce intérieur. Ces interventions viseront à vérifier le respect des prix fixés et, si nécessaire, à verbaliser les contrevenants », a fait remarquer le président de l’Apcci. L’Apcci s’est engagée au respect des dispositions de l’arrêté interministériel sur la fixation des prix, et elle collabore également avec la Direction du commerce intérieur, afin d'améliorer la qualité du ciment mis sur le marché. « Un processus de contrôle est en cours d'élaboration, avec la mise en place de laboratoires d'analyse et le déploiement de brigades de contrôle de la qualité », informe Rachid Yousry. 
 

Les raisons d’un arrêté

En 2022, après la crise ukrainienne, le prix du clinker a connu une augmentation record. Face à cette flambée des coûts et dans un souci de lutte contre la cherté de la vie, le gouvernement a décidé d’intégrer le ciment parmi les produits réglementés. À l’issue de concertations avec les acteurs du secteur, un plafonnement des prix a été instauré : ciment 42.5 : 85 000 Fcfa et ciment 32.5 : 83 000 Fcfa. Cependant, en 2024, bien que le prix du clinker ait diminué grâce à la baisse des coûts de transport, les coûts de production du ciment ont augmenté, en raison de la hausse des tarifs d'électricité (+15 % puis +10 % en six mois), de l'augmentation du Smig, des frais portuaires et d'autres charges impactant l’industrie de la cimenterie. Le gouvernement a, à nouveau, approché les cimentiers pour revoir à la baisse le plafond des prix du ciment. Après plusieurs semaines de concertation entre le gouvernement et les producteurs, un consensus a été trouvé, aboutissant à un prix de 78 000 Fcfa pour le Cpj 42.5 et de 72 000 Fcfa pour le Cpj 32.5, garantissant à la fois l'accessibilité du ciment pour les consommateurs et un niveau de rentabilité minimal pour les industriels. La Côte d’Ivoire dispose de 10 cimentiers sur le marché local, avec 13 usines, une capacité de production totale de près de 16 millions de tonnes, et une consommation de moins de 7 millions de tonnes. Une grande partie des usines tourne à moins de 50% de leur capacité. Dans ce contexte, les cimentiers doivent composer avec des charges financières importantes, notamment le remboursement des investissements liés à l'acquisition de broyeurs coûteux. Ainsi, en dépit des défis économiques, les producteurs de ciment ont fait des efforts pour s'adapter aux nouvelles exigences du marché et collaborer avec les autorités pour garantir un approvisionnement stable et accessible en ciment. Cette démarche s'inscrit dans une logique d'équilibre entre la protection du pouvoir d'achat des consommateurs et la pérennité de l'industrie cimentière ivoirienne.

 

Source : Le quotidien ivoirien "L’Inter", article écrit par Irène BATH

Rachid YOUSRY, DG de LafargeHolcim Ci et Président de l'APCCI